Compteur Linky : qui va payer la facture ?
Malgré son petit nom et sa couleur de Teletubbies inoffensif, le compteur Linky fait plus souvent parler de lui pour de mauvaises raisons. Après un déploiement plus que contesté, voilà qu’un article du Parisien a annoncé la douloureuse… 130€ par compteur pour les consommateurs !
Qu’en est-il exactement ? Retour sur un objet plutôt controversé.
Le financement théorique du compteur Linky
Pour financer le programme Linky, la CRE (commission de régulation de l’énergie), a initialement prévu un différé d’éviter que le coût de production et d’installation du compteur intelligent ne soit soudainement répercuté sur les consommateurs.
Plus précisément, c’est sur la taxe nommée TURPE (tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité) que seront répercutés ces frais additifs dans la facture d’électricité.
La question du coût de déploiement de Linky donc été abordée dès l’origine. Officiellement, il n’était pas imputable aux usagers.
Une équation apparemment équilibrée pour le compteur Linky
Des économies grâce à Linky…
L’équation paraît simple : l’économie annoncée grâce aux bénéfices du programme Linky doit compenser les 140 euros dépensés par compteur. Selon Enedis, elle proviendra de :
- la baisse de coûts de relève du compteur et de multiples interventions parallèles,
- la modification des puissances désormais faite à distance,
- l’absence de renouvellement de compteurs devenus vétustes ;
- la diminution de la fraude,
- la réduction des erreurs de facturation, etc.
Dans sa délibération de janvier 2021 sur le prix du TURPE entre 2021 et 2024, il est bien précisé que «la baisse des charges constatée grâce à Linky s’élève à 1 milliard d’euros sur 4 ans dans le TURPE (environ 250 millions par an). Le montant de cette baisse dépassera les 350 millions par an sur les années suivantes. »
Des dépenses générées par le compteur Linky…
En pratique, le coût de l’installation de Linky, estimé à 456 millions, sera donc bien répercuté sur la facture des usagers. Mais les sommes correspondant aux frais générés imputent pour l’instant un compte dédié à Linky, le compte régulé de lissage (CRL). Elles ne seront dépensées que lorsque les économies promises seront effectivement réalisées et suffisantes. A ce moment-là, elles seront peu à peu intégrées dans le TURPE :
- d’abord à hauteur de 165 millions en 2023 ;
- puis 291 millions en 2024 ;
- et de même chaque année pour atteindre les 2,5 milliards d’euros dépensés, intérêts inclus et ainsi apurer le compte à l’horizon 2030.
Et pourtant… « Sortez le chéquier ! »
« Avec plus de 90 % des foyers désormais équipés, le moment est venu de régler la facture du déploiement de Linky ! » C’est avec cette annonce que Le Parisien a jeté un pavé dans la marre mardi dernier. D’autant que d’autres médias lui ont aussitôt emboité le pas.
Résultat, une pétition en ligne, une montée au créneau des politiques… et un démenti d’Emmanuelle Wargon, ministre du Logement : « Les consommateurs ne paieront pas davantage au titre de Linky» a-t-elle répondu. Ainsi, le gouvernement, tout comme le ministère et la CRE ont officialisé leur démenti. Par un système de mise en balance des économies réalisées, le compteur n’aurait donc pas d’incidence sur la facture des consommateurs.
Le bémol du plan Linky…
Ce démenti s’appuie sur le montage annoncé dès 2014 par la CRE. Pourtant, le Cour des comptes l’avait remis en cause en 2018 en pointant l’écart entre le taux d’intérêt appliqué au différé tarifaire, payé par les consommateurs (4,6%) et celui très avantageux appliqué à l’investissement d’Enedis (0,77%). Sans entrer dans des calculs savants, la marge octroyée à Enedis atteindrait alors 500 millions d’euros. Il y a bien un gagnant dans l’affaire, et ce n’est pas le client. Même si l’opération est dite indolore, dès le 1er août, le TURPE augmentera de 0,91%…
Linky n’a pas fini de faire parler de lui !